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TRIBUNAL ADMINISTRATIF D'AMIENS



TRIBUNAL ADMINISTRATIF D'AMIENS
Préfet de la région Picardie, préfet de la Somme

Avis n° 05-01 du 12 mai 2005
Le tribunal administratif d'Amiens siégeant dans les conditions prévues par l'article R.212-1 du code de justice administrative.
Vu, enregistrée le 14 décembre 2004 la demande par laquelle, le préfet de la région Picardie, préfet de la Somme, en application de l'article R.212-1 du code de justice administrative, sollicite l'avis du tribunal sur le statut et les modalités de gestion possibles de 41 ha de terrains sis dans un hameau rattaché à une commune à la suite d'une fusion intervenue dans les années 1970, lesdits terrains ayant fait l'objet d'une donation de Philippe AUGUSTE au 13ème siècle dont se prévalent en tant qu'ayants droit les habitants du hameau, constitués depuis 1987 en association de gestion alors même que la commune de rattachement revendique la pleine gestion de ces mêmes terrains.

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu, le rapport de M. BEGAULT, vice-président ;

Est d'avis eu égard aux pièces communiquées et sous réserve de l'appréciation de la juridiction compétente ayant à connaître d'un éventuel contentieux de répondre aux trois questions posées dans le sens des observations suivantes :

1°) S'agissant de savoir si les habitants du hameau sont propriétaires des terrains, ayants droits ou simples usufruitiers, il apparaît que la première de ces hypothèses doit être à priori retenue, étant rappelé toutefois qu'il appartient en dernière instance à la seule autorité judiciaire de trancher définitivement ce type de question.

A l'appui de cette appréciation, il y a lieu de rappeler d'abord qu'une donation emporte en principe accession à un droit de propriété. En l'espèce, la réalité de cette donation, quoique historiquement lointaine, n'est pas contestée. La qualité d'ayant droits de cette donation invoquée par les habitants du hameau ne semble pas l'être davantage.

Il convient ensuite de relever que les actes notariés de 1856 et 1875, joints à la demande d'avis, reconnaissent explicitement la qualité de propriétaires des ayants droit de l'époque. Par ailleurs, ces actes ne remettent nullement en cause le ou les titres de propriété préexistants mais se bornent, à établir puis à confirmer, dans les deux cas, un partage en jouissance des biens en cause, partage dont il est explicitement stipulé qu'il aura effet " pour une période temporaire ".

Enfin, il n'est pas contesté que ces biens ont fait l'objet d'énonciations cadastrales indiquant clairement le nom des personnes qui ont à supporter la fiscalité propre à ces biens. Nonobstant leur objet essentiellement fiscal, ces énonciations révèlent néanmoins une présomption de propriété, méritant d'être prise en compte.

2°) S'agissant de savoir si les terrains peuvent ou non être regardés comme des terrains communaux, la réponse ne peut clairement qu'être négative. Pour les motifs sus indiqués, les terrains en cause constituent a priori et en l'état, le patrimoine privé et commun des ayants droits. Aucun élément de fait ou de droit produit au dossier ne fait ressortir l'évidence d'un droit quelconque de la commune à revendiquer la propriété des terrains, soit à titre privé soit au titre de la domanialité publique.

3°) S'agissant des modes de gestion à envisager, il ne peut être utilement répondu à cette question qu'après avoir levé le préalable de la qualification juridique.

Il y a lieu de relever sur ce point que selon les actes notariés produits, ces terrains sont des biens sectionaux. Aucun argument juridiquement dirimant ne va à l'encontre de cette qualification. Les biens en cause ont été donnés sous forme d'un cantonnement en échange de la renonciation à des droits d'usage. Il en est donc résulté pour les bénéficiaires directs et leurs ayants droit la possession d'un patrimoine foncier ayant une assise territoriale propre nécessairement distincte, à ce titre, du point de vue des règles de gestion du reste du territoire communal.

Il suit de cette qualification de biens sectionaux que pour leur gestion tout comme leur possession, les terrains en cause relèvent exclusivement du régime spécifique fixé au titre IV livre premier du Code général des collectivités territoriales. Ce régime offre à l'autorité administrative la possibilité de faire usage de la variété d'options de gestions prévues par ce régime, en fonction du particularisme des situations de fait rencontrées. Ce régime prévoit d'ailleurs, dans certaines hypothèses, la possibilité d'une gestion communale directe de ce type de biens, notamment à l'occasion d'un transfert, tel que prévu à l'article L.2411-11 du code général des collectivités territoriales.

En conséquence de cette qualification, la gestion de ces biens, sous la forme d'une association de droit commun ou d'une SCI paraît devoir être écartée. Quant à l'hypothèse d'une gestion partagée, elle est clairement compatible avec le régime des biens sectionaux tel que défini par le Code général des collectivités territoriales, sous la réserve que les seules règles propres à ce régime soient appliquées.

Délibéré à Amiens, le 12 mai 2005

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